La feuille de route du gouvernement sur la rénovation du Code du travail par ordonnances avant la fin de l’été a été transmise aux partenaires sociaux. Le projet s’articule autour de 3 thèmes :

  • Le plafonnement des indemnités prud’homales,
  • Le regroupement des Instances Représentatives du Personnel (IRP) : CHSCT, CE et DP,
  • L’inversion de la hiérarchie des normes en priorisant les accords d’entreprise.

En préambule, la CFE-CGC rappelle que seules la compétitivité des entreprises, les compétences des salariés et les investissements créent la dynamique nécessaire à la création d’emplois ; et non, la réforme du Code du travail.

Plafonnement des indemnités : suppression de l’effet dissuasif

Le SNGC CFE-CGC est historiquement opposé au plafonnement des indemnités prud’homales qui va, en cas de licenciement sans motif réel et sérieux par l’employeur, supprimer l’effet dissuasif d’une procédure judiciaire et la vertu pédagogique de la condamnation. Si on peut comprendre l’appréhension des « petits patrons » à l’embauche, c’est une aubaine pour les grandes entreprises de licencier à moindre frais.

De plus, la mesure semble injuste au regard des conséquences d’un licenciement en terme de préjudice financier, moral, familial, social … selon s’il s’agit d’un célibataire ou d’un parent soutien de famille, d’un(e) jeune de 20 ans ou, d’un homme ou d’une femme de plus de 40 ans, d’un valide ou d’un salarié handicapé, …, après 6 mois de procédure ou avec Appel, … etc.

Regroupement des IRP : les heures de délégations dans le collimateur ?

Concernant la fusion des Instances Représentatives du Personnel, le SNGC CFE-CGC considère qu’il y a des arguments pour une amélioration mais que le seul objectif de réduire le nombre de réunion et d’heures de délégation ne justifie pas, seul, une telle réforme. Pour exemple, la majorité des instances DP sont annulées à défaut de question traitée souvent directement en « off » avec les DRH concernés. Certaines informations CE impliquent une décision du CHSCT…

Négociation en entreprise : vers le moins disant social

Sur l’inversion de la hiérarchie des normes en priorisant la négociation en entreprise, il faut en connaitre le périmètre en détail et en contrôler l’impact. Si, comme pour le CICE, on peut percevoir un intérêt pour les PME PMI, la réalité de leur usage est malheureusement dans les grandes entreprises très éloignée des motivations initiales du législateur.
Aujourd’hui, le code du travail est la loi. Les accords collectifs (de branche ou d’entreprise) ne peuvent pas être moins favorables à ce que la loi prévoit pour les salariés. L’accord d’entreprise ne peut pas être « moins disant » que l’accord de branche (sauf exceptions). Et le contrat de travail ne peut pas être moins favorable pour le salarié que ce que prévoit l’accord d’entreprise.
Si la nature de l’Entreprise était centrée sur l’intérêt des salariés, pierres angulaires de son activité contribuant à sa profitabilité, à sa réussite commerciale, à l’amélioration de sa productivité et à ses innovation, la négociation en entreprise dans le cadre du dialogue social en serait renforcée et, comme dans certaines entreprises innovantes, les droits des salariés et les conditions de travail pourraient dépassés être plus avantageusement que l’imagination du législateur et des gouvernements successifs en matière de droit du travail.

Mais, il faut être pragmatique.

Les accords d’entreprise sur le temps de travail ou les rémunérations sont rarement plus favorables que la loi. La conjoncture économique, les exigences des marchés financiers, les stratégies courtermistes commerciales, financières et environnementales, un management de plus en plus déshumanisé par le turnover et un carriérisme égocentré en l’absence d’ascenseur social, l’ubérisation, les concessions abusives par comparaison avec les conditions de travail de la sous-traitance et des travailleurs détachés démontrent le contraire.
Les cabinets des médecins généralistes, des spécialistes et de la médecine du travail constatent une hausse des cas de stress, de burn-out, d’accident … L’inspection du travail et les IRP sont débordées par les cas de non-respect des temps légaux et des conditions de travail.

Le Groupe CASINO annonce à la presse financière de bons résultats sur 2016 en terme de CA et de ROC, augmentent ses bénéfices et maintient un haut niveau de dividendes pour ses actionnaires.
Or si nous voulons bien reconnaître à la direction ses choix financiers pérennisant le Groupe CASINO et ses emplois parfois dans la tempête , les derniers montants de la participation et de l’intéressement de nombreux salariés ne payent même plus les cafés. Pire, ils nous conduisent à être défiant sur la santé financière et l’avenir du périmètre France, sur la politique du Groupe en matière de répartition de la richesse créée, du remboursement des dettes et sur les leviers d’amélioration des avantages sociaux en l’état.
Dernièrement, nos magasin ouvrent le Dimanche avec les mêmes effectifs dont le nombre a fondu régulièrement depuis quelques années et en particulier dans l’encadrement ; posant le problème du respect des temps de travail, de repos … . De nombreux supermarchés ont été franchisés et ce transfert d’actifs, comme précédemment pour une partie des activités immobilières, les ont sortis du périmètre DCF … etc. Cette « décapitalisation » d’une filiale au profit d’une autre impacte les résultats DCF, donc l’intéressement des salariés de ce périmètre.
Aussi quels seraient ces nouveaux gains sociaux que les accords d’entreprise permettraient d’obtenir pour les salariés dans le cadre de cette réforme du Code du travail dite « loi Macron » sur un périmètre de plus en plus « dépouillé » de ses revenus et chargé de dettes … ? De réduire les acquis pour garder les emplois ou de travailler plus pour gagner moins ?

Le SNGC CFE-CGC, syndicat réformateur et progressiste, a toujours été ouvert à la négociation … mais avec une entreprise qui considère ses salariés comme une richesse et non comme une variable d’ajustement, les conditions de travail comme une source de développement et non comme une charge, son cœur de métier comme une vocation pérenne pour nos clients et non comme un investissement spéculatif pour des actionnaires.

Suite à l’insistance historique du SNGC CFE-CGC sur le management bienveillant, le groupe CASINO a investi, communiqué et a même été récompensé. Mais si la bienveillance est de donner un sens au travail de chacun, cela implique une stratégie d’entreprise lisible, une confiance entre les partenaires sociaux du fait de leur intérêt commun et une perspective rassurante pour les salariés.

Commençons donc par respecter les accords existants sur le temps de travail !

 

 

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